Jean-Henri Fabre Les livres Article La poésie Le bulletin

 




Jean - Henri Fabre
La mémoire d'une œuvre poétique
...


(par Eric GEIRNAERT *)













La poésie du naturaliste jusqu'au pèlerinage japonais...



Une poésie par la mémoire des livres





      Il faut se faire pèlerin, comme les Japonais, pour se mettre dans les pas de ce saint patron civil des autodidactes. Sur l'étonnante piété scrupuleuse des fils du Soleil Levant, les japonais admiratifs débarquent par cars entiers chaque été pour venir voir la mémoire de l'homme et lire les restes de son jardin (un Eden)...

      D'ailleurs d'aucun disent aussi : "Aujourd'hui encore, il n'existe pas un site Internet digne de l'œuvre et de la figure de cet homme d'exception que les Japonais - toujours eux - tiennent avec Pic de la Mirandole et Léonard de Vinci pour l'un des trois génies [du reste] de l'humanité."










En marge des jugements portés sur l'orientation d'ensemble de l'œuvre
de J.H. Fabre, en marge des critiques (surtout franco-françaises)
j'ai regroupé ici, sans augure, quelques citations du naturaliste...







Les nuages





Les textes "AURORE" et les "Souvenirs Entomologiques" transposés
en infographies sont utilisés pour une exposition en préparation...







 

















Pour l'exposition, les images en
hautes résolutions sont disponibles par
correspondance : eric.ambre.jaune@hotmail.fr










Les hautes régions de l'air

Aurore - 1877 - Les nuages

Aurore - Qui d'entre nous, en regardant les nuées, n'a souhaité l'aile de l'oiseau pour se transporter au milieu de cette ouate céleste, d'une blancheur éclatante qui s'amoncelle en montagnes de coton cardé ? Qui n'a désiré reposer sur le moelleux matelas du nuage, sorte de toison, tantôt plus blanche que neige, tantôt incendiée de rouges réverbérations, comme si quelque fournaise s'embrasait dans son épaisseur ? Et le cortège du soleil couchant, ce cortège de nuages dont la splendeur n'a rien comparable au monde, qui n'a désiré le contempler de plus près ; qui ne s'est demandé dans quels trésors puise le ciel pour créer toutes ces magnificences ? Vous rappelez-vous ces cascades d'or fondu, ces fleuves de braise, ces prodigieux entassements d'ouate couleur de feu, ces tentures éblouissantes dont l'œil a de la peine à supporter l'éclat, enfin tout ce riche appareil dont le soleil, parfois, s'entoure avant de nous quitter ? Que de merveilles produites avec les matières les plus communes ! Ces nuages resplendissants, devant lesquels l'éclat de toute chose terrestre pâlit, ne sont qu'un peu de vapeur d'eau que traverse un rayon de soleil.










La mer

Aurore - 1877 - La mer

Si l'on fait quatre parts égales de la surface entière du globe terrestre, la terre ferme occupe environ une de ces parties, et l'ensemble des mers occupe les trois autres. Sous la mer, il y a le sol, de même que sous les eaux d'un lac ou d'un simple ruisseau. Le sol sous-marin est accidenté tout autant que la terre ferme. En. certains points, il est creusé de gouffres dont on trouve à grand - peine le fond ; en d'autres, il est hérissé de chaînes de montagnes, dont les plus hautes cimes dépassent le niveau des eaux et forment des îles; en d'autres encore, il s'étend en vastes plaines ou se dresse en plateaux. Mis à sec, il ne différerait pas des continents.








L'eau

Aurore - 1877 - L'eau

Aurore - Tous les cours d'eau des continents, fleuves et fontaines, sources, rivières et torrents, ont pour origine les nuages du ciel, formés par la continuelle évaporation des mers sous les rayons du soleil. La fontaine qui se fait jour entre deux rives de cresson, le ruisseau qui bruit dans la prairie sous la verdure des aulnes le torrent qui bondit de chute en chute parmi les rocs éboulés, le fleuve large d'une lieue qui pour tributaires a tous les cours d'eau d'un empire, proviennent également des nuages et retournent à la mer, d'où ces nuages sont venus.








Le lever du soleil

Aurore - 1877 - Le lever du soleil

Mais le voici : au bord du ciel, les nuées s'embrasent ; un vif filet de lumière en jaillit soudain, et à l'instant les sommets des montagnes semblent flamboyer. La terre tressaille devant la radieuse apparition. C'est le soleil qui franchit l'horizon. Le disque étincelant monte toujours : le voilà à peine échancré ; le voilà tout entier, pareil à une meule de fer rouge de feu. La brume du matin en modère l'éclat et permet de le contempler en face ; mais dans peu de temps nul regard n'en pourra supporter l'éblouissante splendeur. Il s'élève dans sa pompe souveraine, de moment en moment plus chaud, plus radieux.











Aurore - 1877 - Les hautes régions de l'air

Aurore - Ce n'est pas le désir d'atteindre une plus grande élévation qui leur manqua, ni le courage nécessaire qui leur fit défaut; mais il arrive un moment où, dans ces hautes régions, la vie est impossible. Là règne un éternel et morne silence, qui porte l'épouvante dans l'âme. La terre cesse d'être visible, ou plutôt les accidents du sol, plaines, vallées, montagnes, se confondent en une nappe brumeuse où le regard ne saisit aucun détail. Un froid pénétrant, comme on n'en éprouve pas au milieu des plus grandes rigueurs de l'hiver, vous transit et vous paralyse. Le découragement, le malaise, le vertige, vous saisissent ; la respiration devient haletante, parce que l'air, de plus en plus raréfié à mesure qu'il est situé plus haut, commence à manquer aux poumons ; les yeux s'injectent de sang, les oreilles bourdonnent ; le pouls bat précipitamment ; tout enfin annonce que la vie est en péril et qu'il est prudent de ne pas aller plus loin.









Les végétaux et l'atmosphère

Aurore - 1877 - Les végétaux et l'atmosphère

Aurore - C'est tout clair : l'atmosphère reçoit sans cesse des torrents de gaz carbonique à défier toute supputation. Mais, ô prodige ! les races animales n'ont rien à redouter de l'asphyxie générale, ni dans le présent, ni dans l'avenir. L'atmosphère, toujours empoisonnée, est toujours assainie ; toujours chargée de charbon, elle en est toujours purgée. Et quel est le providentiel assainisseur qui rend l'air inoffensif ? C'est la plante, mes chères enfants, la plante, qui se nourrit de gaz carbonique pour nous empêcher de périr, et nous prépare du pain pour nous faire vivre. Ce gaz meurtrier, en lequel se résout toute chose devenue cadavre, est l'aliment par excellence de la plante; pour le merveilleux estomac du végétal, pourriture, c'est nourriture. Des dépouilles de la mort, le brin d'herbe reconstitue la vie.









Des yeux pour y voir...

Souvenirs entomologiques - 1923 -

Avons-nous des yeux pour y voir, ou bien y voyons-nous parce que nous avons des yeux ? La fonction fait-elle l'organe, ou l'organe fait-il la fonction ? De ces deux alternatives, l'insecte acclame la première. Il nous dit : "Mon industrie ne m'est pas imposée par l'instrument que je possède; mais j'utilise cet instrument tel qu'il est pour le talent dont je suis doué."









Un peuple sans nombre vit du généreux cerisier

Souvenirs entomologiques - La Mante religieuse; l'Eclosion, Série 5 - 1923 -

A terre, le banquet a d'autres convives. Des cerises tombées, tout un monde de piétons fait liesse. De nuit, les Mulots viennent cueillir les noyaux dépouillés par les Cloportes, les Forficules, les Fourmis, les Limaces ; ils les thésaurisent au fond de leurs terriers. Dans les loisirs de l'hiver, ils les perceront d'un trou pour en gruger l'amande. Un peuple sans nombre vit du généreux cerisier.









L'instinct

Les ravageurs - 1870 - L'instinct

L'animal n'a pas la raison sans doute, cette haute prérogative de l'homme; mais il se conduit cependant comme s'il raisonnait ses intérêts avec une justesse devant laquelle qui réfléchit reste confondu.








La fleur

Aurore - 1877 - La fleur

La plupart des fleurs ont deux enveloppes analogues, contenues l'une dans l'autre. L'extérieure, ou le calyce, est presque toujours de couleur verte et de structure terme; l'intérieure, ou la corolle, de consistance bien plus délicate, est embellie de ces magnifiques teintes qui nous plaisent tant dans les fleurs.






J. - H. Fabre; l'observation

Les ravageurs - 1870 -

La vérité s'acquiert par l'observation; l'homme ne l'invente pas, il doit la chercher péniblement, trop heureux encore quand il la trouve.


Les ravageurs - 1870 -

Ils ne savaient pas regarder. En ces vieux temps, on raisonnait beaucoup, beaucoup trop, car parfois on déraisonnait; mais rarement s'avisait-on d'examiner ce qui est réalité. La patiente observation, mère des sciences, leur était inconnue. Ils disaient : "C'est cela," avant d'avoir vu; de nos jours, on voit avant de dire : "C'est cela."


La vie des araignées - 1949 -

Aux heures requises, toute la bonne saison, il m'est loisible de les interroger, de les suivre dans leurs travaux, tantôt l'une, tantôt l'autre, suivant les chances de la Journée. Ce que je n'ai pas bien vu la veille, je peux le voir le lendemain en de meilleures conditions, et les jours d'après à souhait, jusqu'à ce que le fait étudié se dévoile en pleine clarté.

La vie des araignées en pleine clarté



Souvenirs entomologiques (6ième série, L'atavisme) - 1923 -

Quelles ténèbres derrière ce vocable, l'hérédité ! La science transcendante a essayé d'y projeter quelque lumière. Elle n'a réussi qu'à se créer un jargon barbare, laissant l'obscur encore plus obscur. Pour nous, avides de clarté, abandonnons à qui s'y complaît l'absurde théorie, et bornons notre ambition aux faits observables, sans prétendre expliquer les arcanes du plasma. Notre méthode ne nous dévoilera certes pas l'origine des instincts ; elle nous apprendra du moins où il est inutile d'aller la chercher.



Souvenirs entomologiques - 1923 -

Tant que l'on confondra sous une même rubrique les actes d'instinct pur et les actes de discernement, on retombera dans ces interminables discussions qui aigrissent la polémique sans faire avancer la question d'un pas. L'insecte est-il conscient de ce qu'il fait? - Oui et non, tout à la fois. Non, si son acte est du domaine de l'instinct; oui, s'il est du domaine du discernement. L'insecte est-il modifiable dans ses mœurs ? - Non, absolument non, si le trait de mœurs se rapporte à l'instinct; oui, s'il se rapporte au discernement.







Le message angevin de l'animal !
Glissez la souris sur l'image, et découvrez ...



Eric G : "Etudes entomologiques" - 2002 -

A la naissance elle se pare au dos bombé d'une marque triangulaire sombre qui ne présage encore que peu de chose. Selon J. - H. Fabre : "Les menues bestioles sont d'un jaune terne, avec une tache triangulaire noire sur le croupion. Plus tard, la triple croix blanche, ornement du dos, m'indiquera que ma trouvaille se rapporte à l'Epeire porte-croix ou diadème (Epeira diadema Walck.)".

Il faut attendre en effet la fin de la saison froide pour observer l'animal réapparaître, arborant sa croix que dessinent ces traits blancs mêlés. Telle la représentation d'un archange diaphane, la livrée déployée sur le dos rond, analogue de dimension à une belle noisette, invite désormais l'observateur à se "signer" devant ce spécimen devenu adulte... Celui-ci, par réflexe marque sa circonspection, et, de son index, mime en quatre points cardinaux la symbolique de ce magnifique crucifix. Etrange dessin que celui de l'animal. Est-ce le tableau d'un saint immaculé ? L'ange incolore semble porter quelques galons aux épaules ! Est-il là, bras ouverts pour accorder la vie et guider une destinée ?

(... / ... En glissant la souris sur l'image vous découvrez le message.)


Le message angevin est celui d'une mort, priée par l'emploi des chélicères ; ces poignards venimeux attendent les prochains infortunés pris au piège de la toile.

Ainsi va la vie...

... et la nature des épeires...


Merveille ! L'une des pattes postérieures est tendue hors de la cabane de feuillage, et juste à l'extrémité de cette patte abouti le fil avertisseur ! Qui n'a pas vu l'Epeire en cette posture, le télégraphe en main, ignore l'une des plus curieuses ingéniosités de la bête.

Jean - Henri Fabre

- Le fil télégraphique de l'Epeire, La vie des Araignées, 1949 -

















Durant ses correspondances avec Charles Darwin, Jean
Henri Fabre, s'interroge sur les fossiles de charançons...




Jean - Henri Fabre et l'insecte





L'image ci-dessus a été réalisée avec mes fossiles de l'ambre. Le charançon fossile de l'ambre est
une découverte personnelle à partir du polissage d'un lot d'ambre brut. L'image a été
publiée dans l'ouvrage : Small Wonders. Par Matt Smith. Illustrations Giuliano
Ferri, Infographies et Internet Eric Geirnaert. Edition 2014 - 2015







     Charles Darwin pour qui l'environnement créait des facultés et des organes nouveaux se tourna vers J.H. Fabre pour interroger les insectes. Le français, surtout pragmatique, examinait, respectait les faits, énumérait les hypothèses, discutait âprement les arguments soulevés pour infirmer ou vérifier les théories...

     Le naturaliste du Rouergue se demandait la raison de la persistance morphologique d'animaux fossiles -restés inchangés au cours des longues périodes paléontologiques-. S'il y avait progrès, pourquoi, par exemple, "le charançon, si j'en crois les modestes archives qu'il m'est loisibles de consulter, serait l'aîné des coléoptères" est resté si constant avec "ce rostre, ce bec, ce nez caricatural ? En ses débuts, la vie façonna des étrangetés. Si le curculionide est peu glorifié pour ses talents, ce n'est pas un motif de le dédaigner. En légions toujours prospères, il est parvenu jusqu'à nous sans modifier sa caractéristique (...) Je me risquerais à mettre un nom de genre, parfois même celui de l'espèce" au spécimen fossile.
A morphologie figée, J.H. Fabre en induisait "la permanence des instincts doit accompagner la permanence des formes. En consultant le curculionide moderne, nous aurons donc un chapitre très approximatif sur la biologie de ses prédécesseurs. L'histoire du présent nous racontera l'histoire du passé". Souvenirs entomologiques, t. 7 p. 52 à 60.

     Si, pour Charles Darwin "les instincts ne sont pas conservés à l'état fossile", on notera, à rebours, que le fossile d'ambre restitue parfois sous forme d'une scène intime (d'une extraordinaire précision !) les comportements des insectes occupés dans le courant très significatifs de leurs activités passées.
Inspiration sublime de science, la Nature nous restitue dans l'écrin jaune l'examen possible des conditions normales d'existence des insectes engagés dans ce présent (lointain) statufié dans la pierre.
La scène vivante -et expressive- est laissée en place, sans modification des attitudes par le jeu des coulées de résine. Les positions, les postures, les occupations, presque les préoccupations intimes, sont préservées sans la moindre altération !

     Discutant de la graduation sans doute infinie des instincts fossiles ("le graduel passage de l'essai fortuit, très incorrect, à la pratique parfaite"), J.H. Fabre aurait certainement porté une attention toute particulière à ces ambres rares qui conservent un agissement fossile rapporté par des insectes aux éthologies scéniques déchiffrables !

     Et, le naturaliste d'ajouter : "Darwin, vrai connaisseur, ne s'y méprenait point. Il redoutait beaucoup le problème des instincts. Mes premiers résultats, en particulier, l'avaient laissé anxieux".




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Des clartés nouvelles jaillirent : ce fut en mon esprit comme une révélation. Disposer de beaux coléoptères dans une boîte à liège, les dénommer, les classer, ce n'était donc pas toute la science ; il y avait quelque chose de bien supérieur : l'étude intime de l'animal dans sa structure et surtout dans ses facultés.

Jean - Henri Fabre

"Observation des mœurs des Cerceris dans les Annales des Sciences Naturelles" - 1855 -




Dans la superbe des audaces, la théorie donne aujourd'hui réponse à tout; mais comme mille vues théoriques ne valent pas un fait, la conviction est loin de gagner les penseurs affranchis des systèmes préconçus.

Jean - Henri Fabre

Souvenirs entomologiques, T. 4 p. 35




D'autres viendront qui, faisant récolte, eux aussi, de quelques parcelles (du savoir), assembleront le tout toujours agrandi mais toujours ébréché part l'inconnu.

Jean - Henri Fabre

Souvenirs entomologiques, T. 10 p. 122




J'admire votre candide fois, maîtres qui prenez au sérieux le dire d'observateurs de rencontre, plus riches d'imagination que de véracité; j'admire votre crédule entrain lorsque, sans critique, vous échafaudez vos théories sur de pareilles sottises.

Jean - Henri Fabre

Souvenirs entomologiques, T. 6 p. 152






A suivre...





Pour présenter la poésie de Jean Henri Fabre,
l'exposition "Hoc erat in votis" est en préparation.








"Je suis à la disposition des animateurs nature
pour proposer des contributions gratuites
(textes, photos, infographies) sur
Jean Henri Fabre, les insectes
et la nature".


- Eric GEIRNAERT -

Idées origiales, réalisations Internet
toutes faites par l'auteur.


Email : eric.ambre.jaune@hotmail.fr



Ces présentations consacrées à Jean Henri Fabre sont faites par
E. GEIRNAERT (Auteur, chercheur, photographe) vainqueur
du concours scientifique: "Le Mystère de la Chambre Jaune".
LA RECHERCHE N° 288 Juin 1996 - N° 298 Mai 1997.








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